Flash ou le grand
voyage de Charles Duchaussois (1971)
Genre : Récit autobiographique
Charles Duchaussois est né en janvier 1940 et vit à Paris
durant son enfance. Âgé de quatre mois, il reçoit un éclat d’obus dans l’œil
lors d’un bombardement, ce qui le laissera borgne. Ce détail est cité régulièrement
au fil de son récit. En Novembre 1962, il décide de quitter Paris pour partir à
Marseille en stop, tout seul. C’est alors que l’aventure commence…
De Marseille au Liban, d’Istanbul à Bagdad, de Bombay à Bénarès
pour enfin atteindre Katmandou ; haut lieu de la vague hippies et de la
drogue, Charles Duchaussois nous conte son aventure.
Un voyage avec la drogue, le flash, la dépendance mais
aussi une découverte identitaire, profonde et déconcertante. Il s’associe au
trafic d’armes à Beyrouth, il participe à la récolte du Haschich au Liban, il
dirige un night-club à Koweït, il devient quelques temps médecins des paysans
des contreforts de l’Himalaya. Enfin, il s’immisce dans l’univers de la drogue
à Katmandou : l’opium et le haschich qui font « planer »,le
« flash » de la première piqûre, le « grand voyage » du
LSD. Charles Duchaussois repousse les limites jusqu’à la mort.
Ce récit autobiographique a été enregistré par l’auteur sur
dix-huit bandes magnétiques et envoyées aux éditions Fayard en 1970. Tout au
long de son périple, Charles Duchaussois a livré ses ressentis, ses découvertes
à travers des états d’esprits différents. Ce qui nous offre une sorte de carnet
de voyage frissonnant, haletant et empreint d’émotions. Il décrit son
expérience avec ses tripes, à cœur ouvert, l’esprit et le corps chargés de
substances.
Le récit est narré à la première personne du singulier et
ponctué de dialogues entre l’auteur et les personnes qu’il a rencontré au cours
de son voyage. Certaines auront une place importante tout au long de sa vie. On
y retrouve un lexique spécifique au thème de la drogue. L’auteur nous informe
sur différentes substances : leurs caractéristiques, leurs effets et les
risques qu’elles peuvent engendrer mais aussi sur le commerce de la drogue,
leur culture et leur légalisation dans différents pays.
Avis personnel :
Charles Duchaussois nous confronte,
nous lecteur passif, aux tourments du voyage sous acide, à la dépendance
pulsionnelle, à la peur de l’autre et de soi, à la défiance des règles
établies, à la crainte de mourir ou de ne pas survivre. Il nous emmène dans sa quête
personnelle ou il côtoie la misère, le désarroi, la maladie mais aussi l’amour,
l’extase des sens et les relations humaines. Charles Duchossois a la capacité
de nous plonger avec lui dans son histoire, la tête sous l’eau, comme en apnée.
Je me suis attachée à l’auteur et à son histoire de vie. Malgré ses excès, ses
prises de risques et ses travers, je lui ai découvert une sensibilité, une
empathie et une force incroyable. J’ai retrouvé un profond humanisme chez cet
homme et à la fois une mise en danger délirante. Ce récit m’a donné le goût de
la lecture par la richesse des émotions décrites et la beauté des expériences
vécues. C’est un voyage à chaque lecture. Jamais le même. Ce récit brise des
idées reçues sur la drogue autant qu’il peut en appuyer. L’histoire ne fait pas
peur, elle impressionne par son oscillation entre réalité et folie.
La postface du livre raconte le retour de l’auteur à Paris
et s’achève sur cette confession : « Maintenant
il me faut réapprendre à vivre. Et pour ça, il faudrait que j’aie le courage de
me désintoxiquer. Je tâte mon sac où j’ai mon héroïne et ma méthédrine. Ce
courage, est-ce que je l’aurai ? … » P473
Quelques citations :
« Il n’y a que la
piqûre - la piqûre, le shoot ou le fixe - qui donne le flash. Voilà pourquoi
tout vrai drogué, un jour ou l’autre en arrive finalement à la piqûre. Et devient un junkie. Un Dieu. Ou une loque. Au choix. »
Préface
« A Katmandou au
temps dont je parle, la vie n’est pas la vie ordinaire. Les actes les plus
ahurissants, les conversations les plus démentielles, les excès les plus
énormes sont monnaie courante. Nous sommes une petite société qui vivons dans
une ivresse permanente, celle des dizaines de drogues de toutes sortes que nous
fumons, mangeons, prisons, nous distillons dans les veines… le rythme solaire
n’existe plus…. Le normal n’existe plus. C’est l’anormal qui le devient. »
P 167
« Elle me prend la
pipe des mains, se l’allume et hop, en avant la « planète » à deux,
assis là, en plein marché de Katmandou…. » P 180
"Ecoutez ce que la méthédrine à outrance peut faire germer dans l'esprit d'un drogué :
"Être ou ne pas être ?
Si bas mais vaste monde
Fais donc crier à la ronde
De tes pores crachants
En tes abysses angoissants
Par tes déserts brûlants
Sur tes océans grondants
Que le plaisir de te fouler
En un sain matin de rosée
Sous ton aura de lumière
Brillante de mille poussières
Ne doit jamais faire oublier
A l'orgueilleux aux deux pieds
Que lui passe et trépasse
Sur ta peau qui jamais ne se lasse" P457-458
Extrait de la bande dessiné "Flash ou le grand voyage" de Thomas Koltarek et JEF |
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